Se corriger, ça veut dire quoi ? (réflexion critique)
UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
Travail présenté à madame Michèle Salesse
dans le cadre du cours Atelier d'écriture 1 (LIT2250-11)
La présente réflexion vise un double-objectif. Le premier est de satisfaire les exigences du cours et de produire un regard critique sur mon texte (J'aime pas l'odeur du café). Le second est de développer ma pensée dans son ensemble, sous trois angles différents : mon dernier travail, l'écriture en général et mon rapport à l'Art versus l'université. J'utiliserai donc les trois pages permises à leur plein potentiel, et en suivant de manière cohérente mes trois angles posés. Je serai à la fois un bon élève et un homme satisfait de ce qu'il écrit : exclamation!
Mon récit en est un psychologique dans lequel un jeune enfant est impliqué, comme personnage principal et narrateur. Ce dernier pourrait avoir environ cinq ou six ans. Le flou autour de son identité ainsi que celle de ses parents sera explicitée dans la deuxième partie de ma réflexion. Par contre, je peux identifier certaines informations qui me furent utiles pour l'édification du personnage. Je le voyais efféminé, curieux, taciturne et recourbé sur lui-même – physiquement et psychologiquement -, car incompris voire rabaissé par ses parents.
J'ai intégré à ce récit deux dialogues, dont un jumelé à la prose, ainsi que trois « intrusions de l'oralité » dans la narration littéraire, lorsque les expressions rendues littéralement pouvaient renforcer l'histoire. C'est par ces procédés que la psychologie des personnages se développe tout au long du récit. Celui-ci dévoile une relation malsaine entre parent et enfant où le dialogue n'existe pas. Les parents sont caricaturaux mais également représentatifs d'une certaine population du Québec. L'histoire est à mon avis tragique, sans tomber dans le mélodramatique. Elle crie la vérité, simplement, à travers un jeune garçon qui a voulu arrêter de parler.
Pour cette nouvelle j'ai choisi un narrateur-héros, Maxime, le jeune garçon et protagoniste de l'histoire, qui raconte sa mésaventure au passé – dans sa tête. Il y a quelques incursions dans le présent mais celles-ci surviennent quand les faits ou les descriptions sont toujours d'actualité. Le récit est raconté peu de temps après les événements, le narrateur y est encore très jeune. De là une pauvreté du langage et les multiples répétitions. La vision du monde, aussi, a été adaptée en fonction du personnage et de ses yeux encore naïfs malgré tout. Malgré qu'il ait été aussi cruellement projeté dans la vie, au sein d'une famille dysfonctionnelle et misérable. Cette histoire en est une d'injustice et d'ignorance.
Quant aux ruptures temporelles, elles ont permis de raconter le récit au passé, avec ce que cela permet comme recul, tout en ayant des dialogues au présent qui permettent d'entrer dans le vif de l'action. Dans cet ordre d'idées, j'ai découpé l'histoire afin d'en placer le cœur dès le début, avec la réaction de la mère face au geste incompréhensible de son fils. Les fragments suivants, dialogues et prose, viennent à expliquer le pourquoi de cette première engueulade.
Bien sûr, ce texte représentait un autre défi. Le tout dernier dans le cadre de ce cours. Il y a quelques ateliers, justement, la professeure nous a dit que le fait d'écrire dans la peau d'un enfant était difficile et en-soi, un bel exercice. Je m'étais dès lors fixé comme objectif de le faire. Sortir de moi, encore une fois.
L'inspiration est toutefois venue de mon enfance, en fait, l'histoire entière pourrait se situer très proche et très loin de moi. D'abord, cet acte apparemment cruel de violenter un chat sans raisons, eh bien je l'ai fait, et j'avais trois ans. Moi aussi m'a mère m'a fortement engueulé, et moi aussi j'ai été puni. Cependant pas de la sorte, pas aussi brutalement; pour ma part c'était sans violence ni avec de telles vulgarités dans le langage. De mon côté mes parents sont séparés et mon père ne m'a jamais battu. Voilà pour les dissemblances et l'inspiration première. Je reviendrai dans le deuxième volet sur la transgression qu'a constitué l'écriture de ce récit.
Rétrospectivement, je crois avoir relevé les trois défis que je me suis donnés tout au long de la session. Mes trois personnages et mes trois récits sont très différents, tout autant la langue qui a accueilli leur création. Si je puis me permettre de les retranscrire synthétiquement ici : Luc (écrivain prétentieux de 19 ans), Blandine (femme incertaine de 27 ans), Maxime (garçon troublé de 5-6 ans). Je voulais tester mon écriture dans différents univers. Je voulais m'explorer en écrivant des histoires. Je me suis retrouvé dans la passion de créer.
*
Maintenant que j'ai recueilli la plupart des points alloués pour mon dernier travail, élargissons! La fente s'entrouvre : Jedevient, par l'écriture, Ilapparaît ensuite, faisant place, de façon surprenante, au Tu qui révèle.
Ce Tu, c'est une sorte de Moi virtuel, celui qui est toujours, tapi au ras de l'Art, prêt pour venir pointer à l'artiste. Pointer quoi ? C'est un secret qui ne se dévoile pas, qui ne peut se dévoiler...
Jes'excite de pouvoir dire de telles choses. Jes'excite d'imaginer.
Mystères soulevés.
J'ai constaté que je veux partager une écriture ouverte. Ouverte à l'interprétation, au regard esthétique, philosophique, jeune ou vieux. Je tends vers une écriture des plus universelles possibles, s'il en est. Je désire aussi ne pas cloisonner mon œuvre dans des intentions, ces a priori qui causent du téléologique, ou bien des discours académiques ou bien des récits avares de sens. Je veux ouvrir des horizons, pas en vendre!
Pourquoi je me défie autant ? Car Je est dangereux, bien sûr, mais aussi car selon mon Désir, celui d'écrire et de vivre, ensemble, dans le même mot, maîtriser l'outil de « mise en relation » m'est primordial. Pour ce faire, je dois tendre l'oreille et offrir ma bouche. Donner à l'Erreur et refuser la Perfection. Faire des efforts et me contredire, patenter, m'influencer, tâtonner, recommencer. Un cours est un gymnase parmi d'autres.
Construire des ponts.
Concernant ma nouvelle, je voulais me laisser guider davantage par un processus inconscient - pour son écriture. J'y suis finalement parvenu, mais par un moyen insoupçonné. Au départ, je voulais écrire ma nouvelle pendant une ou deux séances d'écriture semi-automatique, en étant dirigé par l'émotion plus que par l'intellect, chose que je n'ai pas l'habitude de faire. Ainsi ai-je entrepris les premiers mots de cette nouvelle (une page). Mais les écritures suivantes ont été ardues, trop ardues, impossibles.
Chaque jour je repoussais ce « devoir » qui me dérangeait, d'autant plus que j'étais submergé de travaux ou de lectures plus « intéressantes ». Le dernier samedi, donc, je me suis attelé à la tâche. Ce fut tout aussi raboteux, et les phrases s'affirmaient au compte-goutte. J'en avais beaucoup moins à dire, qu'espéré au départ, et je pensais être en train d'écrire un récit insipide. À la toute fin, quand je me suis relu j'ai été surpris. L'histoire était presque finie, je ne voyais pas beaucoup de corrections à faire et j'étais plutôt satisfait du résultat.
Ce que j'en déduis ? Mon « inconscient », pendant tous ces jours de résistance, travaillait à mon « insu ». D'ailleurs, en parlant de Lui, je lui fais de plus en plus confiance et je pense que cette confiance est réciproque. Il me dévoile de plus en plus de mystères sensés.
Aparté sur le dernier travail (cri du goéland bleu!). Confirmation sur l'inadéquation de la correction (mauvais commentaires pour le texte sur Blandine). Castration ponctuée de maladresses. Arrogance ? Non, mieux. C'est l'élève qui s'élève contre lui-même! Comment peut-il même penser que c'est ainsi que l'on se corrige ? L'élève relativise. Prendre et laisser. Régurgiter sa liberté dans un carnet de poche, le mal passe. Cet élève sait que de merveilleux ponts sont à venir. Je accepte d'apprendre.
Je s'incarne l'audace de sa confiance. Jesait que les mots du professeur ne sont pas absolus.
S'inspirer d'un fait vécu et le surdimensionner, le recréer, c'est se jouer du réel, de sa propre réalité, c'est se réinventer et s'organiser autrement; en d'autres termes, écrire c'est devenir. De par ma dernière nouvelle je suis redevenu enfant, cet enfant qui a fait une bêtise mais en fait, non, ce n'était plus moi, j'avais un père violent, j'étais insensible à la douleur, je détestais ma mère, tout mon cadre a surimplosé, j'avais une autre histoire. Ma mère était devenue laide, j'avais un chat nommé Bedaine, je le voulais plus beau, je voulais devenir coiffeur, je voulais ne plus exister à cause de mes parents. Savoir me devenir...par l'écriture. Dans ma tête tout transgresser.
Et Je se traverse.
Parvenir au pays des merveilles interréalistesen perpétuelle métamorphose. Oublier. Redevenir. Qui suis-je ? Comment ? Pourquoi ? C'est la révolte des pronoms et l'extase des formes. Savoir-devenir couleur pour s'imprégner, redéfinir les merveilles : cette rue croisée chaque matin, miroir, une bouche qui se trémousse.
Miracle.
J'ai enfin compris. Cela n'a pas été long. Après deux mois j'entends avec lucidité. Transcendance et Immanence, l'évidence! Je vois, je goûte. La critique s'envole mais la voix reste. Retour au pays natal : Passion. Être l'autodidacte-enfant. Ce que cela signifie ne se dit pas en mots. Je suis un passionné débordant. Incorrigible.
Ainsi sa vie recommençait, encore et enfin.
1Corriger (Robert) : 1. Ramener à la règle (ce qui s'en écarte ou la personne qui s'en écarte). 2. Supprimer (les fautes, les erreurs). 3. Relever les fautes (de qqch.) en vue de donner une appréciation, une note. 4. Rendre exact ou plus exact. 5. Rendre normal ce qui ne l'est pas. 6. Ramener à la mesure (qqch. d'excessif) par une action contraire.